mardi 24 novembre 2015

Trois questions à… Dominique Colombier, aumônier des hôpitaux de La Rochelle et Rochefort

Dominique Colombier, pasteure de l’Église protestante unie de France, 
est engagée depuis cinq ans dans un ministère spécialisé : 
l’aumônerie des hôpitaux de La Rochelle et de Rochefort. 
La quête de sens bien présente - sous de multiples expressions - 
dans notre société dite sécularisée interpelle et vivifie son ministère.








On dit volontiers que l’Église est missionnaire ou qu’elle n’est pas. En tant qu’aumônier des hôpitaux comment vous situez-vous ?


Le lien entre l’Église locale et l’aumônerie hospitalière est essentiel. L’aumônerie hospitalière n’est pas une présence hors sol. Elle est le signe de l’envoi de l’Église dans cet endroit qui représente bien souvent une enclave dans la société. Les hôpitaux sont situés fréquemment dans des quartiers périphériques, ce qui les marginalise. L’aumônier est la passerelle qui relie le dedans et le dehors. Il témoigne auprès de l’Église de ce qu’il expérimente dans ce lieu qui fait peur, qui angoisse. En retour il est important que ce ministère particulier soit porté par la communauté, lors de cultes, d’échanges avec le conseil presbytéral, par la prière d’intercession. Ce ministère doit irriguer la paroisse et l’aumônerie doit s’interroger sur sa communication ou sa non-communication.

Quel est votre rôle en tant qu’aumônier protestant ?

L’aumônier protestant, en cohérence avec le cadre défini par la Charte nationale des aumôneries de la fonction publique, accueille et s’engage à respecter les convictions philosophiques et religieuses de chacun ; il refuse à ce titre tout prosélytisme.
La mission s’inscrit dans le relationnel. Les patients et les soignants sont journellement confrontés à la fragilité de la condition humaine. Le rôle premier de l’aumônier est l’écoute pour faire advenir chez l’autre, parfois dans des moments ultimes, l’émergence de questions existentielles : qu’est-ce que l’homme ? quel sens a ma vie ? qui suis-je devant Dieu ? Peu à peu la parole se libère, sans artifice. Ce rôle ne se limite pas aux malades, dans l’intimité d’une chambre. Les familles, les soignants, l’équipe d’aumônerie hospitalière manifestent souvent le besoin d’échanges, de soutien…


L'équipe d'aumônerie hospitalière
La mission va de pair avec l’évangélisation. Dans cet espace public, quelle parole peut-on oser ?

C’est avant tout, je crois, le lieu du témoignage implicite par le simple fait de se réclamer de l’aumônerie. Croyante ou pas, la personne visitée sait qui je suis. Et moi je sais où je me situe. Je suis portée par un ensemble de convictions, qui prennent sens ou sont bousculées au contact des uns et des autres. Elles ne font pas système. Ce que je reçois peut entrer en résonance avec des textes bibliques. Si les circonstances le permettent, il m’arrive d’en proposer la lecture et la méditation. En tant qu’aumônier je me sens souvent dans la situation d’accueil, accueil de l’autre, accueil du Tout Autre. J’arrive à percevoir comment moi-même je suis évangélisée par la présence de celui qui souffre, par ce qu’il me confie... Je peux être témoin d’une foi incarnée, très vulnérable, témoin de la vie qui est à l’œuvre chez l’autre. Chaque histoire humaine est singulière. L’aumônier est une sorte de courroie de transmission, un passeur, du simple fait d’être là, sans savoir préalable. Cela suffit pour qu’un autre puisse approcher sa vérité. Il me donne sa confiance, cadeau inestimable. Donner, recevoir… chacun est bénéficiaire de l’autre sur sa route. L’espace clos de la visite peut devenir espace de liberté, le lieu d’une expérience spirituelle décisive. Simple messager, j’espère, par ma présence, rendre crédible une Parole, qui bien au-delà des mots, apporte la lumière et l’espérance en l’amour inconditionnel de Dieu, quel qu’ait pu être le parcours de sa vie.
Dans ce contexte, le verset biblique « L’Esprit souffle où il veut », prend toute sa cohérence.

Propos recueillis par Janick Pilot



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